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A propos des algues du Lac au duc …

Dans le journal Ouest-France des 7-8 octobre 2017, un ploërmelais s’émeut de l’état de l’eau du Lac « le Lac est vert…bleu par endroits. En 1976, nous avons eu une canicule, et l’eau n’était pas dans cet état-là ». Le groupe « EAU » de l’association POLEN qui s’est constitué en 2011 sur cette problématique, propose des éléments de réponse obtenus lors de ses nombreux contacts avec les acteurs de terrain et à partir des études scientifiques déjà parues.


Pourquoi l’eau prend-elle cette couleur verte, voire bleue, à certaines époques ?

Il s’agit d’une prolifération d’algues microscopiques, appelées cyanobactéries. Leur accumulation peut entraîner des odeurs et elles produisent, lorsqu’elles meurent, des toxines qui sont potentiellement dangereuses : irritations de la peau et autres. D’où les interdictions de baignade prises par les autorités.

Ces proliférations sont-elles un phénomène récent ?

L’été 2011, nous avions été surpris et interpellés par ce phénomène qui a motivé notre groupe à se constituer.
Deux ans plus tard, en septembre 2013, l’association POLEN organisait – avec de nombreux partenaires- une « une Fête de l’eau » sur les rives du lac pour informer et réfléchir à la qualité de l’eau. Ce jour-là, la prolifération des algues était visible.
Depuis 2013, cela s’est produit plusieurs fois, avec des interdictions de baignade. Dans les décennies précédentes, nous n’avons pas de témoignages montrant une telle fréquence du phénomène.

Quelle en est la cause ?

Les cyanobactéries existent depuis des millions d’années, mais leur prolifération est le résultat d’une conjonction de facteurs, comme le montrent les études menées en France et dans de nombreux pays. La chaleur favorise la multiplication des cyanobactéries et c’est en été que le problème se pose. Mais il faut pour cela d’autres conditions favorables : la présence dans l’eau de nitrates, qui les nourrissent, et de phosphore qui est une condition nécessaire à leur développement. Nitrates et phosphore (phosphates) arrivent par l’Yvel et ses affluents et s’accumulent dans le Lac.

D’où proviennent les nitrates et le phosphore et pourquoi sont-ils davantage présents depuis quelques années ?

Ils sont issus des activités agricoles, industrielles et domestiques. Une partie des engrais chimiques sont emportés par les eaux de ruissellement et se retrouvent dans les rivières. Les rejets industriels et domestiques, même après leur passage dans une station d’épuration, en contiennent. Depuis quelques décennies, de nombreux produits nouveaux ont été mis sur le marché, et sont utilisés pour ces activités. Ils finissent en partie dans les rivières.

Que peut-on faire pour combattre ces proliférations d’algues ?

On peut essayer de « traiter » : cela a été tenté en répandant du calcaire dans l’eau dans le but de contrarier la croissance des cyanobactéries. D’autres recherches seront menées (Ouest-France du 9 novembre 2017) mais les scientifiques mettent en garde pour l’avenir d’ « ajouter un produit dans un milieu naturel, sans en connaître l’impact sur la faune et sur la flore ».

Des réponses aux questions ci-dessus, on peut surtout déduire qu’il faut tarir les produits qui favorisent la multiplication de ces algues…Cela revient à modifier nos comportements, et ce n’est pas une mince affaire !

Des mesures ont-elles déjà été prises ?

Depuis plusieurs années, les phosphates sont interdits dans les lessives. Les stations d’épuration traitent les rejets industriels et domestiques, même si des améliorations doivent encore être apportées. Les assainissements non collectifs sont contrôlés.
Surtout, les pouvoirs publics ont élaboré une politique de la qualité de l’eau qui est concrétisée dans notre région par le Syndicat Mixte du Grand Bassin de l’Oust. En plus des actions générales d’incitation à la réduction des engrais chimiques et des pesticides, celui-ci a lancé un programme important de reconquête de la qualité de l’eau dans le bassin-versant de l’Yvel sous la forme du Contrat Territorial Milieux Aquatiques (CTMA, 2015-2018). Il s’agit de restaurer le bon état écologique de l’Yvel et ses affluents : enlèvement des obstacles (buses), reméandrage de ruisseaux, renaturation des berges pour éviter l’érosion et les apports de limon…

Trois millions d’euros sont consacrés à ce plan. Nous avions écrit aux maires des communes concernées et les communautés de communes (de 2014) de Ploërmel et Mauron ont augmenté leur participation de 20 000€ par an. Il est intéressant de noter que pour un euro apporté par les communes, l’Agence de l’eau, le Conseil Régional…apportent 4€. Mais dans l’idéal, il faudrait six ou sept millions d’euros de travaux.

Et la fin des proliférations d’algues, c’est pour quand ?

On comprend que c’est un travail de longue haleine. Les mesures prises ont diminué les apports en nitrate et phosphore dans l’Yvel et donc dans le Lac au duc. Il faut continuer dans ce sens et même accentuer les efforts de tous.

Nos recherches ont attiré notre attention sur un autre aspect du problème. On insiste, avec raison, sur la qualité de l’eau. Mais des témoignages d’acteurs de terrain et nos observations montrent que la quantité de l’eau qui arrive au Lac diminue. Le fait que le niveau ait été très bas ces dernières années en automne n’est pas dû uniquement à la faiblesse des précipitations. Les prélèvements d’eau ont augmenté pour l’agriculture (animaux et arrosage), l’industrie, les particuliers. La vie dans les rivières s’en ressent et la concentration des produits y augmente forcément.

Le but de notre groupe est de faire connaître ces problèmes et de soutenir des propositions. Les journaux annoncent ces jours-ci que la Charente n’a plus de débit à son embouchure, au grand dam des éleveurs de moules. Évitons cette extrémité à nos rivières en prenant conscience que l’heure n’est pas à l’augmentation des prélèvements mais aux économies d’eau et à la culture de plantes moins dépendantes de l’eau. Anticipons le changement climatique qui ne fera qu’aggraver la situation.

Les explications/réponses de notre groupe EAU.
contact : René Le Goff :